On se sert du roman policier pour faire passer toutes sortes de « messages », messages prétendument humanitaires, ou carrément philosophiques! Il y a un courant assez fort, actuellement, qui véhicule des trames ayant pour base l’indispensable policier véreux et l’assassin, innocente victime du sort. ... Entre parenthèses, aucun suspens quant à l’identité du coupable : c’est invariablement « la société ». Et tout cela, bien sûr, baigne la plus béate utopie.

— Paul Halter, À 139 pas de la mort

samedi 7 janvier 2012

La Balle de Nausicaa — Paul Halter (2011)

La Balle de Nausicaa est le nouveau recueil de nouvelles de Paul Halter. Le livre était publié le 27 décembre par Createspace, un service d’auto-publication… américaine ! Pour quelque temps, le livre était disponible seulement sur Amazon.com, et la situation n’était pas idéale pour les admirateurs français du Maître. Le livre est finalement apparu sur Amazon.fr, mais en rupture de stock.

C’est ironique : la décision d’éditer le livre avec Createspace a facilité mon achat du texte. Tout récemment, je suis devenu un « Haltérophile » sincère, et c’est ma première fois achetant une nouveauté de Halter. (J’adore la couverture !) Je pense que je suis un des premiers (si ce n’est pas le premier) de recevoir et lire ma copie du livre, alors j’espère que cette critique sera intéressante pour ceux qui attendent leurs propres copies.

La Balle de Nausicaa recueille sept nouvelles, dont la nouvelle titulaire était inédite en France. (Elle était traduite et publié en anglais comme « Nausicaa’s Ball » dans Ellery Queen’s Mystery Magazine.) Deux des nouvelles (Le Spectre doré et L’Abominable bonhomme de neige) étaient traduites en anglais et étaient inclus dans la traduction de La Nuit du Loup. Mais c’est la première fois qu’elles sont tous ensemble en français.

La collection en sa totalité est agréable ; quelques histoires sont meilleures que des autres, mais c’est le même cas avec presque tous les recueil de nouvelles. Il n’y a aucune nouvelle entièrement terrible, mais quelques-unes sont moins fortes que des autres. Je trouve que l’écriture de M. Halter est appropriée aux nouvelles, et quelques-unes ici semblent prouver ma thèse. Voici mes critiques détaillés sur chaque nouvelle :

La Balle de Nausicaa
Rachel Syms est une belle comédienne, mariée à un type assez désagréable nommé George Portman. Ils séjournent sur l’île de Corfou au même temps que l’amant de Rachel, Anthony Stamp. Anthony et Rachel sont tombés en amour lors du tournage de leur dernier film, inspiré pas la légende d’Ulysse. Maintenant, on parle d’une possibilité d’une suite, alors leur séjour est relaxant (en théorie) et pratique.

Mais pendant ses vacances, George Portman meurt près du « lagon bleu », un endroit accessible seulement par un chemin escarpé. La mort semble être accidentelle… mais le docteur Alan Twist n’est pas trop certain. Un indice en particulier éveille l’intérêt de Twist : une petite balle qui le rappelle de la légende de Nausicaa, qui était en train de jouer à la balle avec ses amis quand elle a découvert Ulysse…

La liste des personnages est minuscule et la nouvelle n’est pas construite sur un crime impossible— on dirait plutôt que c’est une histoire avec un alibi « parfait » qui n’est pas si parfait. La fascination de Paul Halter avec la mythologie grecque est évidente, et le thème de l’histoire lui donne plusieurs chances de démontrer cette obsession. L’atmosphère est agréable— en somme, c’est une bonne lecture. Pas un chef d’œuvre, mais plaisant.

Il y a seulement un problème potentiel avec l’intrigue : l'arme possible du crime est jeté dans l’eau, qui efface tous les traces de sang… mais quand même on a pu enlever des empreintes digitales pour identifier quelqu’un ! Peut-être ce n’est pas impossible, mais ça semblait peu probable, surtout car l’arme était dans l’eau un bon bout de temps…

Le Spectre doré
Charles Godley est Ebenezer Scrooge incarné, et un Noël, il reçoit un visiteur. C’est une fille qui vend des allumettes, et elle est terrifée. Un mystérieux spectre doré la poursuit. Godley est sceptique : la neige est partout et seulement les traces laissées par la fille sont dans la rue. Mais quand un ami visite Godley, il confirme l’histoire de la fille !

La solution est astucieuse, mais encore, la liste des personnages est si petite qu’on peut facilement deviner la majorité de l’énigme si on se concentre. Mais l’ambiance ici est excellent, surtout car on ne connait pas les intentions du spectre. Est-il malicieux ? Bienveillant ? Que veut-il ? On apprend tout à la fin…

La Tombe de David Jones
Accusé d’un assassinat, David Jones jurait jusqu’à sa mort qu’il était innocent. Et il a juré que Dieu lui-même supportera son histoire avec quelque signe. Quand on a enterré David, de ce moment, aucune herbe ne pousse plus sur sa tombe… Quand un promoteur veut construire un terrain de golf sur les lieux, il essaye en vain de lever cette ancienne malédiction. On change le sol, construit un mur, mit des gardes en place… mais même avec des précautions presque paranoïaques, aucune herbe ne pousse sur la tombe…

Mais le docteur Twist va résoudre tout, bien sûr. La situation impossible est créative et simple, et la solution est décente… si tout marche. Le coupable a pris des risques, et si seulement une chose ne va pas comme prévu, tout serait découvert facilement. Mais en général, la nouvelle est bien écrite et intéressante.

L’Étrange regard
Ceci est la nouvelle la moins intéressante. Il y a trois personnages : une femme obsédé avec Gene Tierney, sa fille, et le compagnon de la mère (qui partage son obsession). Tout simplement dit, j’ai déjà vu cette idée, écrit par un autre auteur dans un roman. C’était bien fait, et Halter ne copie pas la situation ; seulement l’inspiration est le même. Mais si vous connaissiez l’inspiration duquel je parle, vous connaissez tout dès la première page. Je ne veux plus dire, pour éviter les « spoilers ».

L’Abominable bonhomme de neige
Ceci est le chef d’œuvre de la collection, à peu près sur le même niveau que La Marchande des fleurs dans La Nuit du Loup. L’idée est brillante : Irving Farrell essaye de trouver la maison d’un ami, mais il se perd. En marchant, il rencontre un homme étrange et ils commencent à parler. L’étranger lui commence de raconter une histoire d’un meurtre bizarre. Il y a plusieurs ans, un homme nommé Fred Graves était assassiné… par un bonhomme de neige ! Un témoin a vu la victime sa battre avec le bonhomme, qui a fini en poignardant Fred. Mais comment est-ce possible ? Seulement les traces de la victime étaient dans la neige…

Encore on trouve une situation créative ; c’est Halter en pleine forme. C’est une nouvelle presque parfaite. L’atmosphère est plutôt sinistre, et la formule du « meurtre dans le passé » marche bien dans l’ensemble. Il y a plusieurs personnages (et alors plusieurs suspects), et la solution est sublime. C’est une grande surprise, et la conclusion est simplement magnifique.

Le Clown de minuit
J’admire beaucoup l’originalité de M. Halter, mais cette nouvelle m’a rappelée un peu trop une des nouvelles de La Nuit du Loup. La situation est simple : une femme insiste qu’un clown vient la visiter une fois par semaine à minuit, et elle est terrifiée. (Aucune situation impossible, hélas !) La nouvelle est courte (seulement huit pages !)… La surprise est plus efficace car l’histoire est terminée avant qu’elle peut commencer proprement…

Mais voilà le problème aussi : c’est un peu trop court, et j’ai déjà vu cette solution. Bref, j’étais préparé pour la fin et il n’y avait aucune surprise pour moi. Passons à la dernière nouvelle.

La Malle sanglante
54 pages de longueur et divisée en trois parties (la dernière est un épilogue), on peut appeler cette nouvelle un court roman. Et la première partie est un petit bijou de sortes : on rencontre le narrateur, Sanders. Il rencontre un homme étrange qui se présente comme Noël Togram. Leur confrontation est une des plus bizarres, avec plusieurs rebondissements et des développements complètement inattendues.

La deuxième partie est plus lente et concentrée, mais après la rapidité frénétique de la première partie, elle semble un peu lente. La solution n’est pas entièrement étonnante (j’ai deviné la plupart des énigmes), mais j’aime beaucoup la conclusion. La dernière phrase est un des meilleures conclusions écrite par Paul Halter.

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