On se sert du roman policier pour faire passer toutes sortes de « messages », messages prétendument humanitaires, ou carrément philosophiques! Il y a un courant assez fort, actuellement, qui véhicule des trames ayant pour base l’indispensable policier véreux et l’assassin, innocente victime du sort. ... Entre parenthèses, aucun suspens quant à l’identité du coupable : c’est invariablement « la société ». Et tout cela, bien sûr, baigne la plus béate utopie.

— Paul Halter, À 139 pas de la mort

lundi 30 avril 2012

L'Assassin habite au 21 — Stanislas-André Steeman (1939)

Ça fait deux mois et demi depuis le premier meurtre, et l’assassin laisse sa carte de visite à chaque scène de crime. Il se fait appeler "Mr. Smith "… pas un alias particulièrement intéressant, mais apparemment c’est efficace : la police ne peut pas trouver Mr. Smith, et les Smiths de Londres passent une période très difficile ... Jusqu'au jour que Toby Marsh raconte une histoire étonnante: après le récent meurtre commis par Mr. Smith, il a suivi l’assassin à son domicile, et peut donner à la police l'adresse: l’assassin habite au 21 Russell Square! Mais voici le problème… le 21 Russell Square est une pension de famille !

Ainsi commence L'Assassin habite au 21 de Stanislas-André Steeman. Il est, sans aucun doute, un chef d’œuvre, un des plus grands roman policiers de tous les temps. C’est un délice de la page 1 à la page 187. Lorsque nous rencontrons les habitants de 21 Russell Square, ils s'attendent à un nouvel hôte pour arriver: M. Julie, un professeur de français au Collège de France. Il vient en Angleterre pour étudier au British Museum. La police saisit l'occasion de kidnapper M. Julie, lui fait savoir de la situation et demande pour son aide de l’intérieur. La réaction de Julie est inattendue : il décide de fuir la maison! Mais avant qu’il puisse s’enfuir, la main de Mr. Smith l’a frappé… Maintenant, l'assassin a montré sa main et son jeu avec la police devient plus dangereuse encore…

Curieusement pour un livre de ce genre, L'Assassin habite au 21 combine des scènes très sombres et intenses avec certaines scènes extrêmement drôles. Par exemple : lorsque nous rencontrons les résidents du 21 pour la première fois, le Major Fairchild essaye d’envahir la salle de bains, tandis que Mrs. Crabtree se défend de sa position stratégique dans la salle de bains. Un autre exemple : quand Mr. Smith assassine M. Julie, il téléphone plusieurs journaux pour annoncer le nouveau crime... et personne ne le croit pas !

«Qui parle? »
« Mr Smith, en personne. »
« Oh! Mr Smith… Ici, le chancelier de l'Échiquier ! Comment allez-vous, vieille branche ? … Allô !... Al-lô !... » (Chapitre 6)

Steeman parvient à construire un bijou merveilleux. L’intrigue est excellente. Les indices sont tout à fait là-et il y en a un particulièrement diabolique. Quand le masque tombe du visage de Mr. Smith, la scène est brillante ! Le lecteur se promène dans un brouillard Londonien avec deux personnages— duquel un est Mr. Smith, mais il n’est pas nommé. Mr. Smith menace l’autre personnage, et cette personne essaye de l’échapper sans succès. La scène est sombre, intense, remplie de suspense ... et la surprise est tout à fait inattendue! Et encore, la solution est toute nettement construite, tellement satisfaisante ... Il me manque des mots pour la décrire !

Que puis-je dire à propos de ce livre? Je ne veux pas en dire trop mais si je dis trop peu, mon enthousiasme pourrait ne pas être suffisamment clair. Permettez-moi de cette façon: de tous les mystères que j'ai lus cette année, L'Assassin habite au 21 est mon favori absolu. C'est un grand roman policier qui inclut même un défi au lecteur inspiré par des défis similaires dans les œuvres d’Ellery Queen.

Note: Ce livre a été transformé en pièce de théâtre par Steeman, et était adapté au cinéma par le fameux Henri-Georges Clouzot.

Une autre note: Selon mon exemplaire, L'Assassin habite au 21 a été voté comme le meilleur roman policier de tous les temps, battant Le Mystère de la chambre jaune et Le Meurtre de Roger Ackroyd. Je ne sais pas quand ce vote a eu lieu et où, mais c'est justement ce genre de classique.

3 commentaires:

  1. Je ne l'ai jamais lu mais vu en film et je confirme : c'est excellent. Peut-être le truc paraitra-t-il suranné mais il n'empêche que c'est une brillantissime intrigue (je jeu des acteurs en plus).

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  2. Bonsoir,
    Excellent, en effet mais il ne saurait battre Le meurtre de Roger Acroyd (A. Christie) qui est un chef-d'oeuvre et qui a fait date dans l'histoire du roman policier (il est, d'ailleurs, étudié dans certaines universités).

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  3. qui est mort le 21 a russel square?

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